• Vie de misère.

     

    14 juillet 2019, anniversaire de mariage. 25 ans de mariage. Noces d'argent. La plupart des couples réunissent leurs amis, font une grande fête...

    Silence total.  Pas un mot, pas une allusion. Rien. Je n'ai pas osé en parler vu les coups de canif que j'ai mis dans le contrat et toi tu n'as rien dit non plus. Y as-tu pensé autant que moi ? ou alors pas dutout ? je n'en ai aucune idée. Pourquoi fêter 25 ans de galère en fin de compte ? noces de sang serait plus juste que noces d'argent.

    Chaque jour qui passe nous rapproche de la fin. Quelle fin ? Je n'en sais rien. Qui de toi ou moi explosera en premier ? qui de toi ou moi osera ? osera franchir le pas ? partir... mettre fin à cette mascarade. A cette union malsaine. Que faisons nous chaque jour ? juste sauver les apparences devant les gens, devant les enfants. Parce que ni toi ni moi n avons le courage de repartir de zero seul. Avoir peur de l'inconnu tout en sachant pourquoi on est malheureux, c'est tellement bête...

    Je ne sais pas ce que tu penses de ta vie mais pour moi c 'est un long chemin de croix. 

    Je me sens humiliée chaque jour par ton ton autoritaire, ton silence, tes réflexions cassantes à moi ou aux enfants. Tes réflexions aux enfants me font encore plus mal que celles dirigées contre moi. Plus le temps passe et plus elles me blessent, plus je les prends comme des coups de couteau en plein coeur. 

    Je n'ai aucunement le sentiment d'être ta femme. Je me sens "gouvernante" "bonne" "femme à tout faire" "prostituée"... Je suis un meuble. Un meuble de ton quotidien. Tu me vois par habitude, je fais "tourner" la maison... Tu vis avec moi en parallèle... 

    C'est fou de n'avoir jamais rien à dire... de positif ! si tu ouvres la bouche c 'est pour critiquer... ma mère en premier, les enfants en deuxième et moi. Toi ? tu es parfait. Tellement parfait que l'un des surnoms qu'on t'a donné est "Dieu"... "Dieu" et "le Grizzly" car tu grognes, tu fais peur, tu ronfles comme un ours. Le silence...Peu à peu j 'ai cousu mes lèvres pour éviter de te voir en colère pour une parole de travers, exploser pour un truc insignifiant... le silence pour avoir la paix...Je tourne ma langue dans ma bouche, toujours, j'essaie de ne plus répondre aux "piques" même si je brûle de l'intérieur.

     

    Je passe mes journées les yeux dans le vague à imaginer une autre vie. Une vie où je serais heureuse, simplement, avec un homme qui m'aime et que j'aime et qui me valorise un peu, qui me dise de temps en temps que je suis jolie, qui me redonne un minimum confiance en moi. Un homme tendre, qui me ferait rire,  qui me prendrait la main, qui me serrerait dans ses bras, qui s'endormirait tout contre moi. Notre vie de couple c'est la banquise glaciale.

    Non j suis pas malheureuse. C'est vrai. J'ai une belle maison, matériellement ca va bien. J'ai deux beaux enfants. Mais putain qu'est ce que je suis pas heureuse !

    Je n'ai qu'une envie : Partir. Devenir quelqu'un d autre. Ailleurs. Le moi que j'aimerais être.  Une voix en moi de plus en plus vive me hurle de m'en aller, mais je suis prisonnière de cette vie. La peur me force à rester encore, à supporter encore et encore ce que je ne supporte plus.

     

    La vie m'a déjà tendue une perche. Je rêvais de changer de vie, j attendais la possibilité de m'envoler et puis le jour où une occasion s 'est présentée j 'ai eu peur de prendre mon envol. Je me déteste pour cela.

    Au début de notre mariage j'étais pleine de rêve. Je me disais qu'on allait avoir une belle vie. J'y croyais. Et année après année tu as tuée la jeune fille que j'étais.  Trop de différences dans nos façons de voir les choses. Tu ne sais pas rire, t'amuser, sortir, te faire des amis... Tu m as peu à peu modelée à ton image. Solitaire, renfermée, sur moi-même. Je rêvais d une vie à deux, mais je me suis retrouvée très seule. Tu n'étais jamais là, tu rentrais tard. Chaque fois que j ai osé aborder le sujet ta réponse a été "tu le savais quand on s est mariée" donc te plains pas ! Au fil des ans je me suis habituée à vivre seule, avec les enfants. A tout assumer, travail, courses, ménage, éducation des enfants... et les années passant encore j en suis venue à apprécier que tu partes, à me sentir soulagée quand tu passais la journée ailleurs.  

    Comment partir ? comment te regarder et te dire "je ne t'aime plus". Je n'en n ai pas la force là est le problème. Alors je me tais. J'avale chaque jour mon désespoir. Je m'accommode tant bien que mal de la sitution. Je ne te supporte plus. Ni ta démarche, ni les programmes tv  que tu regardes, ni la musique que tu écoutes. Mais je ne dis rien. Parfois tu souris, tu es agréable c'est rare mais ça arrive et là je culpabilise de mes mauvaises pensées et je me déteste. 

    Je ne suis pas heureuse mais ma vie ressemble à un sable mouvant. Je ne peux pas m en extirper. Je ne vois que des sens interdits, des montagnes infranchissables, c 'est mission impossible.

    Je n'aime plus ma vie. Son inertie. Son silence. On ressemble à des fantômes qui se meuvent sans bruit dans une maison sans joie de vivre.

    On est mariés, on est deux, mais je me sens si seule. En regardant ces 25 ans de vie commune c 'est ce qui ressort en premier à mes yeux : cette solitude.

    Le pire est que de l'extérieur on passe pour un couple parfait. Personne ne devine ma solitude mon mal de vivre... quelles larmes je cache derrière mon sourire.

    Je me suis construit une vie à moi au fil des ans, un univers parallèle à notre vie pour rester vivante, ne pas sombrer.  Je t'ai trompée et tu l'as deviné.  Tu t'es senti victime, je me senti coupable mais pourquoi nous en étions là ? tu ne t'es pas remis en question. Tu as pleuré de rage, d'humiliation, de colère.  Moi je dirais qu'il y a deux victimes, pas une seule. Deux victimes d une vie qui ne nous correspond plus.

     

    "Pourquoi tu m'as fait ça ?" Je te réponds "parce que j'étais seule, t'étais jamais là, parce que j'étais malheureuse"... j'ai pas l'impression que tu entends.  C'est tellement plus profond que ça. "J'avais besoin de tendresse, d'attention, de mots d'amour, d'aimer et de me sentir aimée, désirée, belle dans le regard d un homme" mais comment te dire ça ?" L'amour a croisé mon chemin par hasard, je ne l'ai pas cherché, il m'est tombé dessus et je l'ai suivi. Je savais que c'était dangereux, que le terrain était miné, que je pouvais marcher à tout instant sur une mine qui dévasterait ma vie mais j'avais trop besoin de chaleur. Besoin de me sentir vivante. Besoin d 'exister pour quelqu'un.

    Toi et moi on a été dévastés mais pas pour les mêmes raisons. Et puis le temps apaise. Les morceaux de nous se sont un peu recollés et nous avons continué notre vie insipide. Toi indifférent à tout, dominateur, dirigeant tel un roi son royaume, ses sujets soumis. Et nous. animés par une révolte sourde et profonde mais trop faibles pour partir... changer de vie... 

     

    Chacun notre ordinateur sur les genoux à jouer, en silence, devant la tv. Ce  soir, comme hier soir, comme demain soir,  le même scénario, la même routine. Toi à un bout du canapé moi à l'autre bout. Toi la télécommande dans la main à zapper encore et encore à mettre des films à l'opposé de ce que j'aime regarder, comme si tu le faisais exprès. Moi mes écouteurs sur les oreilles à m'évader dans la musique ou sur les tchats. A chercher désespérément un ailleurs...

     

    Une vie de misère. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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